Le mois de décembre a été marqué par l’organisation à Paris de la COP 21. Une conférence internationale ayant pour ambition de permettre d’éviter les conséquences potentiellement catastrophiques du réchauffement climatique en cours. Celle-ci a été conclue  par un accord, dit « Accord de Paris » qui a été salué unanimement. Mais ne s’agit-il pas d’un leurre ?

 

Cette « Conference Of the Parties » (COP) ne s’est pas soldée par un échec, comme la précédente à Copenhague en 2009. L’accord par lequel elle s’est conclue, qualifié d’ « historique »,  est par ailleurs plus ambitieux que l’objectif initial de la COP21, qui visait à contenir le réchauffement climatique sous le seuil de +2 °C. Il prévoit de le maintenir « bien en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels » et de « poursuivre les efforts pour limiter la hausse des températures à 1,5 °C », ce qui « réduirait significativement les risques et impacts du changement climatique », notamment pour les pays insulaires.

 

Un plafond à 1,5°C irréaliste

 

Cependant, pour beaucoup d’observateurs, en l’état actuel des émissions mondiales de gaz à effet de serre, le plafond de 1,5 °C est irréaliste, sa mention, demandée par les petits États insulaires menacés de submersion, ayant surtout une portée symbolique et politique.

Ce volontarisme est affaibli par l’absence d’objectifs chiffrés à long terme. Il est seulement prévu de viser « un pic des émissions mondiales de gaz à effet de serre dès que possible », puis de parvenir à « un équilibre entre les émissions d’origine anthropique et les absorptions par des puits de carbone au cours de la deuxième moitié du siècle ». En ce qui concerne le long terme, le texte est flou, ne contient aucun chiffre et ne parle plus de 'neutralité climatique'. Les parties chercheront seulement à « parvenir à un pic des émissions le plus rapidement possible » pour entamer une réduction des émissions peu après. Cela, afin de parvenir, à la fin du siècle, à un équilibre entre émissions de gaz à effet de serre et absorption des émissions par les puits de carbone (la capacité des forêts à absorber le CO2).

 

Un mécanisme de révision dans… dix ans !

 

Selon le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), il faudrait faire chuter de 40 % à 70 % les émissions mondiales, d’ici à 2050, pour éviter un emballement climatique incontrôlable. Or, le mécanisme de révision n’interviendra qu’à partir de 2023-2025, bien trop tard pour éviter de franchir à terme les +3°C. La différenciation des efforts demandés aux pays, en fonction de leur responsabilité historique dans le changement climatique et de leur niveau de richesse a, cette fois encore, cristallisé l’opposition entre Nord et Sud. Pour solder leur « dette climatique », les pays du Nord ont promis, en 2009, de mobiliser 100 milliards de dollars (91 milliards d’euros) par an, d’ici à 2020, pour aider ceux du Sud à faire face aux conséquences du dérèglement climatique, sécheresses, inondations, cyclones ou montée des eaux. Des financements dont les nations les plus vulnérables réclament une révision à la hausse pour les prochaines décennies. Le texte leur donne en partie satisfaction, en faisant de ces 100 milliards « un niveau plancher », à partir duquel « un nouvel objectif chiffré collectif » devra être fixé « avant 2025 », mais sans engagement pour la suite. De plus, ce plancher de 100 milliards figure dans la décision d’accord et non dans l’accord lui-même, ce qui l’aurait exposé au risque d’être rejeté lors d’un processus de ratification par le Congrès américain, à majorité républicaine et climatosceptique. 

                                                                                             (Éléments d'informations issus de la grande revue de presse du 17/12/15 centrée sur le dérèglement climatique de la Fondation Nicolas Hulot pour la Nature et l'Homme)

 

La société civile mise de côté : une invitation à encore plus de mobilisation

 

Du fait des attentats à Paris, et des mesures de sécurité prises par le gouvernement français, nombre d’actions citoyennes n’ont pu se dérouler comme prévu. Ainsi, le village mondial des Alternatiba, autorisé à Montreuil au dernier moment, mais avec des conditions d’accès très limitées (stations de métro fermées, lignes de bus absentes…), n’a accueilli qu’entre 20 et 30.000 visiteurs alors que l’Alternatiba France organisé en septembre à Paris en avait accueilli plus de 100.000…  Pour la coordination mondiale Alternatiba, les engagements pris par les États «  nous placent sur une trajectoire de +3°C, et ont toutes les chances du monde de la dépasser car ces engagements ne sont ni contraignants, ni assortis de sanctions s’ils n’étaient pas tenus ».  Et celle-ci de renchérir : « L’Accord de Paris est le reflet cruel du manque de rapport de forces actuel du camp voulant empêcher la déstabilisation du climat et construire une transition sociale et écologique juste et ambitieuse. Il doit nous inciter à mettre les bouchées doubles en terme de mobilisations, de construction de réseaux et de mise en place de stratégies efficaces, dans les quelques années que nous avons encore pour gagner les batailles décisives (désinvestissement des énergies fossiles, fin des subventions publiques à ce type d’énergies, blocage de certaines infrastructures et projets climaticides etc.) permettant d’éviter de franchir les seuils d’emballement climatique ».

Lire sur alternatiba.eu : L'Accord de Paris ne stabilisera pas le climat