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Lors du conseil des ministres du 7 avril, le gouvernement s’est déclaré favorable à un projet visant à renforcer la position de la Polynésie française comme « hub » pour les flottes de pêche internationales. Mais celui-ci ne fait pas l’unanimité au sein des armateurs locaux et il inquiète les organisations écologistes.

 

+ Les changements climatiques ne sont pas la seule menace à la survie des stocks de poissons. On a l'impression que les stocks se maintiennent, alors qu'en fait, ils s'écroulent très souvent, du fait notamment de la surpêche. L’avis du gouvernement ne laisse pas de poser des questions en annonçant vouloir dérouler le tapis rouge (ou bleu ?) à la pêche par les bateaux étrangers dans les eaux internationales, en développant l'offre des services support à terre et en investissant de l'argent public dans des infrastructures.

 - Le conseil des ministres est favorable au projet visant à renforcer la position de la Polynésie comme « hub » pour les flottes de pêche internationales. Redresser l’économie en berne, renforcer la sécurité alimentaire, encourager mes filières productives locales : tous les motifs sont bons au conseil des ministres pour justifier « un projet de hub pour les pêcheries internationales du Pacifique Sud-Central avec le développement et le renforcement de services aux flottilles de pêche étrangère ». (…) Cette annonce pose donc beaucoup de questions, et devra nécessairement être complétée par des explications plus précises sur les conditions dans lesquelles la Polynésie accueillerait davantage de pêcheurs étrangers.

Projet de « hub » pour les pêcheries internationales (Radio 1)

 

- 10 à 11 milliards de Fcfp par an. C’est ce que pourrait générer la concrétisation du projet de hub pour les pêcheries internationales, qui a reçu un avis favorable du conseil des ministres, mercredi dernier. Si cela représente une opportunité économique indéniable pour le Pays, le projet n’emballe pas tous les acteurs de la mer, notamment les armateurs. (…) Mais si ce projet présente des perspectives économiques positives, il ne fait pas l’unanimité au sein des armateurs locaux. Selon nos sources, 95% d’entre eux y seraient opposés. (…) Si le gouvernement a émis un avis favorable, la création d’un hub reste en cours de réflexion.

Projet de hub de pêcheries internationales : les avis divergent (TNTV)

 

 - « En 2018, l’Aire marine gérée (AMG) Te Tainui Atea est créée par le gouvernement polynésien. Son objectif est la gestion durable de notre territoire maritime. Si le défi est ambitieux, les mesures mises en place seront-elles à la hauteur ? », interroge Tahiti Pacifique qui relève des ambiguïtés dans les définitions Aire marine gérée (AMG) et Aire marine protégée (AMP) (…) « Seul 0,1% des eaux polynésiennes fait l’objet d’une protection officielle. (…) Pour une gestion durable sur le long terme, l’AMG doit donc prévoir la création d’espaces protégés, au sens strict du terme ». Et le magazine de s’interroger : « comment un projet hautement industriel comme le projet aquacole de Hao pourrait-il avoir sa place dans une AMP ? Pourquoi l’exploitation minière, bien que non pratiquée à ce jour, ne fait-elle pas l’objet d’une interdiction totale au sein de notre ZEE ? Comment la pêche hauturière polynésienne pourrait-elle être durable lorsque les nouveaux navires qui pêchent aux Marquises ciblent essentiellement une espèce menacée sur la liste rouge de l’UICN, le thon obèse ? ». Des questions qui expliquent sans doute que l’AMG proposée par le gouvernement polynésien n’ait pas eu la reconnaissance nationale, ni internationale, qu'elle espérait, lors du “One Planet Summit”, en janvier dernier.    

L’Aire marine gérée Te Tainui Atea, un concept polynésien à la hauteur des enjeux ? (Tahiti Pacifique)

 

+ On s’interroge naturellement du côté des organisations écologiste du fenua,

- L’antenne polynésienne de Sea Shepherd s’est ainsi exprimée sur ce projet de hub. Dans une Lettre Ouverte adressée au président du Pays, elle dit fortement s’y opposer.

Sea Shepherd contre le hub de pêcheries polynésien (Tahiti Infos)

- La fédération des associations de protection de l’environnement estime quant à elle nécessaires des mesures importantes de protection des aires marines de la zone économique exclusive de la Polynésie française. Dans un courrier envoyé en février au président du Pays, la FAPE Te Ora Naho émettait ses recommandations « pour protéger 30% de la ZEE dont 10% fortement, et pour renforcer la protection de la totalité de la ZEE par des mesures de gestion complémentaires. Le zonage défini par le Conseil des ministres pourrait ainsi contribuer à la mise en œuvre des recommandations nationales, européennes et internationales, et permettre d’obtenir une reconnaissance internationale pour l’AMG de Polynésie française. Ces mesures de protections sur l’ensemble de l’AMG incluraient 30% de cette surface en AMP telles que définies par les normes mondiales (UICN 2012, 2018). »

 

+ Pour rappel

En mars dernier, la Polynésie française participait à deux organisations régionales de gestion des pêches (ORGP), connues sous leur acronyme anglais: la WCPFC, pour le Pacifique Centre et Ouest, et l’IATTC, pour le Pacifique Est. Ces organisations, plus communément appelées « commissions thonières », ont pour mission la gestion durable des stocks de poissons hautement migrateurs, tels que les thons et espèces associées.

Les principaux défis pour la Polynésie française sont de:

  • Faire aboutir les stratégies de gestion pluriannuelles pour les principales espèces de thon, dont les progrès annuels conditionnent le maintien de notre certificat MSC pour le thon blanc et le thon à nageoires jaunes ;
  • Renforcer la réglementation internationale et faire appliquer une meilleure gestion des DCP dérivants par les flottilles de pêches étrangères dans les eaux internationales pour éviter leur dérive dans la ZEE polynésienne ;
  • Veiller à ce que l’effort de pêche en haute-mer soit mieux régulé, puisque la ZEE Polynésienne est l’une des ZEE de la région les plus entourées de haute-mer.
  • Soutenir les mesures de gestion en faveur d’une meilleure protection des espèces d’intérêt particulier, telles que les requins, tortues et mammifères marins notamment, puisque notre ZEE est un sanctuaire pour ces espèces.
  • Encourager les travaux conjoints voire une harmonisation de la gestion entre les deux ORGP, puisque notre ZEE a la particularité d’être à cheval sur les deux ORGP.

Stratégie polynésienne de participation aux organisations régionales de gestion des pêches (presidence.pf) CM du 3 mars 2021

 

+ Pour info: La surpêche mondiale est un fléau

Après Cowspiracy en 2014, qui révélait les ravages de l'élevage intensif, le réalisateur britannique Ali Tabrizi enquête sur l'impact de la pêche industrielle avec son nouveau documentaire choc, Seapiracy. (…) Seaspiracy nous alerte en effet sur plusieurs phénomènes néfastes, comme la pollution colossale des filets de pêches (formant 46% du vortex de déchets du Pacifique nord), ou le problème des "prises accessoires", ces nombreux poissons involontairement capturés lors de la pêche et qui ne survivent généralement pas, même après avoir été relâchés. Selon l'ONG WWF, 40% des prises de pêche mondiales sont inutilisées, gaspillées, ou introuvables. Seaspiracy torpille également les labels de pêche durable, démontrant qu'ils ne peuvent garantir que leurs chartes soient respectées.

Seaspiracy, un documentaire choc sur la pêche industrielle (euronews.com)

 

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