Une rencontre internationale discrète de scientifiques (géologues, climatologues, anthropologues), mais d’une importance capitale, s’est tenue à Berlin début novembre. Ce colloque a pris acte de l’existence de l’anthropocène, ce moment de l’ère Quaternaire qui pourrait être le miroir de l’extraordinaire réussite de l’Humanité, mais aussi nous annoncer les prodromes de notre extinction.
Mais qu’est-ce que cette fameuse anthropocène ? Voilà quelques décennies que nous sommes entrés dans une nouvelle ère géologique dominée par l’action humaine : l’anthropocène, notion proposée en 1995 par le prix Nobel néerlandais Paul CRUTZEN. “Un point de basculement a été atteint", a résumé l’historien Christophe BONNEUIL, coauteur en 2013 du livre L'Événement anthropocène (Seuil). "Les humains sont devenus une force tellurique qui change la face de la Terre autant que les éruptions volcaniques”. La question peut paraître lointaine, sinon futile pour le grand public. Elle concerne en réalité le devenir de la planète et peut-être, le destin de notre espèce.
L’homme transforme la face de la Terre et bouscule les équilibres naturels
Cette révolution a en effet entraîné une augmentation de la population humaine à la fois récente et stupéfiante. « Les démographes estiment que la Terre était peuplée de 3 à 400 millions d’humains au moment de l’ère chrétienne », explique André ROPERT dans son blog sur L’Express. « La progression s’est faite lentement puisque les 500 millions ont sans doute été atteints à la fin du Moyen-âge. Il faut entre quatre et cinq cents ans pour que ce nombre double : 1 milliard en 1800 et là, l’emballement commence. Il suffit alors de 130 ans pour doubler ce chiffre : en 1930, nous sommes 2 milliards. Puis, en l’espace de la durée d’une vie, nous passons de 2 à 7 milliards en 2014. Les projections pour la fin du XXI° siècle se situent entre 9 et 11 milliards ». Et A. Ropert de poursuivre : « L’explosion de l’espèce humaine se fait aux dépens des autres espèces, détruisant la biodiversité tandis que les activités industrielles et l’utilisation des combustibles fossiles modifient insidieusement la composition de l’atmosphère. L’homme transforme la face de la Terre et bouscule les équilibres naturels ». L’intégration de cette notion d'anthropocène est fondamentale dans la recherche de solutions à la situation – qui peut devenir dramatique - à laquelle est confrontée aujourd’hui l’Humanité dans sa globalité.
En savoir plus :
- Une image valant mille mots, on peut visualiser cette vidéo sur YouTube : Des images exceptionnelles des flux d'énergie (électricité, pipelines...), de communication (câbles sous-marins) et de transport (routes, voies ferrées, voies maritimes et trafic aérien) montrent la toile qui s'est tissée sur toute notre planète.
- Et aussi : "L'Homme est aussi dévastateur que l'astéroïde qui a mis fin aux dinosaures"
- Pour mieux comprendre les enjeux en cause pour l'Humanité : L'anthropocène, une nouvelle ère géologique ? Sur YouTube, une conversation entre Alain Gras, anthropologue et sociologue, et Claude Lorius, glaciologue. Et des questions : peut-on résoudre les problèmes par une fuite en avant technologique ? Faut-il envisager un modèle de décroissance ?
Besoin d'un exemple ?
En Amazonie, explique l’agronome Antonio DONATO NOBREON dans Le Monde du 26 novembre, "on a détruit au cours des quarante dernières années 763 000 km² de forêt. Cela signifie que 184 millions de terrains de football ont été rasés depuis les années 1970, soit deux fois la superficie de l’Allemagne. Il faut s’imaginer un tracteur avec une lame de trois mètres de long roulant à 756 km/h pendant quarante ans sans interruption : une sorte d’engin de fin du monde".
- Lire aussi, sur sciencesetavenir.fr : la forêt commence à présenter des failles dans son rôle régulateur du climat et l'avenir de l'homme en dépend.Un célèbre chercheur brésilien, Antonio Donato Nobre, de l'Institut national des recherches spatiales (INPE), lance un cri d'alarme dans son rapport "L'avenir climatique de l'Amazonie" fondé sur 200 articles et recherches sur le thème.