L’actualité de la deuxième quinzaine du mois de juillet a été fortement marquée par la venue en Polynésie française du chef de l’État. Ce qui a sans doute laissé dans l’ombre d’autres sujets suivis habituellement par notre revue de presse AvA-Infos, dédiée à l’actualité de la protection de l’environnement et du développement durable. Pour autant, avec, notamment deux sujets polémiques mis en lumière (les conséquences des essais nucléaires et la crise Covid), elle incite à engager des réflexions de fond.
+ la thématique des conséquences des essais nucléaires, qui concerne environnement et santé, s’est retrouvée au cœur de la visite présidentielle : annonces d’Emmanuel Macron, mais aussi manifestations d’une opposition qui a pu (un peu) se faire entendre malgré des interdictions de rassemblement. Si les 193 essais atomiques menés depuis près de 60 ans en Polynésie française, particulièrement aux Tuamotu, sont des événements du passé, leurs conséquences sont toujours présentes et doivent être traitées avec justice.
+ De même, il a été question de la crise liée à la Covid-19 : dans ses conséquences sanitaires mais également dans ses conséquences sociétales – en particulier en ce qui concerne les libertés garanties par la constitution. Il est difficile en effet d’envisager une société démocratique dans laquelle elles ne seraient pas respectées. Une manifestation s’est déroulée le 24 juillet pour dire non à la vaccination obligatoire et au pass sanitaire.
Des enjeux de civilisation
Il n’est pas question, ici, de développer ces deux sujets – complexes - qui ont fait l’objet de nombreux articles et reportages. La revue de presse nécessaire serait trop longue. Il n’est pas non plus question de prendre parti pour telle ou telle position. Il est néanmoins légitime de s’interroger :
# Nucléaire –
En ce qui concerne les conséquences des essais nucléaires, la visite présidentielle est l’occasion de rappeler la nécessité de repenser notre organisation économique en tenant compte de notre projet de société dans un environnement mondialisé, pour le meilleur et pour le pire, et en l’adaptant aux nouvelles données énergétiques et à la préservation de l’environnement
(Cf. l’analyse de l’anthropologue des techniques, Alain Gras *, pour lequel « l’énergie est le lieu imaginaire où se résument les rapports de l’homme à la nature, où se révèle le sens de leurs relations et où s’enracine toute la modernité sociotechnique »).
# Covid-19
- En ce qui concerne la crise sanitaire Covid en cours, il est utile de rappeler l’étymologie du mot “sanitaire“, qui contient les mots "soin" et "choix", pour mieux soulever l’antinomie qui existe entre ce que recouvre ce mot et ce qui est en train d’être imposé à des populations. Quid du consentement éclairé et libre ?
Rappelons aussi, on ne le sait pas assez, que cette crise correspond à une problématique écologique majeure. Depuis le début du siècle, de nombreux scientifiques alertent en disant que « nous sommes entrés dans l'ère des pandémies** ». La destruction généralisée de la biodiversité entraîne l'émergence de nouveaux virus. La déforestation, l'urbanisation, l'agriculture industrielle et la mondialisation économique entraînent l'espèce humaine dans une catastrophe écologique, sociale et sanitaire
* Un enjeu de civilisation (cairn.info)
** "La fabrique des pandémies" : un livre, et bientôt un film en partenariat avec le Cirad (voir la vidéo Youtube)
# Environnement –
+ La visite du chef de l’État a été aussi l’occasion de rappeler la nécessité pour les îles Tuamotu d’organiser leur résilience face aux risques cycloniques. La demande d’appuyer l’inscription au patrimoine mondial de l’Unesco des îles Marquises a démontré, de même, combien les deux termes de “ nature” et de “culture” sont étroitement associés dans la mentalité polynésienne.
+ Deux étapes figuraient encore au programme de la délégation présidentielle : la visite du CRIOBE, Centre de recherche et observatoire de l'environnement et l'inauguration de l'éco musée "Te Fare natura" (Maison de la nature). Les deux structures voisines sont implantées en baie d'Opunohu à Moorea.
+ Emmanuel Macron s'est montré extrêmement ferme et déterminé vis à vis du projet chinois de ferme aquacole de Hao, un projet qui « n'a pas de création d'emplois documentée, a des investisseurs douteux et a fait l'objet de beaucoup de réserve sur la nature de ses financements ».
+ Enfin cette visite a démontré l’importance de protéger les aires marines qui entourent les archipels polynésiens. Un polygone qui permet à la France de posséder le deuxième plus vaste espace maritime (au 2e rang mondial, juste derrière les États-Unis d'Amérique). Le projet de grande aire marine protégée (AMP) des Marquises, représenterait ainsi à lui seul 430 000 km2 dont environ 120 000 km² seraient réservés à la pêche artisanale, jusqu’à 50 milles marins des côtes. L’autre partie serait une zone de protection intégrale d’environ 310 000 km2 entre 50 milles et 200 milles marins au sud et à l’est de l’archipel.
Les réponses qui seront apportées à ces problématiques sont importantes puisqu’elles représentent des enjeux de civilisation. AvA-Infos reviendra de façon plus précise sur certains de ces sujets.